30 novembre 2004

Adieu veaux, vaches...

Pour revenir de Saint-Grégoire où je m'étais rendu hier 'par affaires' en passant par la 235 et la 202, j'ai quitté les routes numérotées et emprunté les rangs.



Elles sont tristes les fermes en novembre. Maisons et bâtiments comme des ilots perdus au milieu d'un champ unique à perte de vue couleur de terre labourée. Quasi personne dehors, quelques tracteurs et machines grandeur inhumaine arrêtées au bout d'un champ, signes d'essoufflement.



D'animaux, pas de traces, sauf... quelques moutons en pacage qui me semblent bien maigres juste avant les grands froids. Ni veaux, ni vaches, ni cochons, ni poules visibles... Plus de traces aux couleurs d'une quelconque culture. Que de la terre retournée et quelques squelettes d'arbres en fond de terre et autour des habitations qui semblent inhabitées -- sauf les deux ou trois où s'est arrêté l'autobus scolaire qui me précédait sur un bout du chemin.



Des drames et des chiffres sortent au grand jour pendant cette période de ras-le-bol des producteurs laitiers qui se font littéralement voler leurs vaches à terme tant les prix payés par l'abattoir à monopole sont bas. Revenus nets négatifs en 2003 chez les producteurs laitiers; parallèlement à ces pertes, le prix des terres et de la machinerie est à la hausse. Relève inexistante ou démotivée, découragements, dépressions, suicides, drames familiaux, inexorable exode... Entre 800 et 1000 producteurs abandonnent le rêve de leur vie à contrecoeur et doivent se résigner à vendre leur terre à plus gros qu'eux chaque année au Québec. La dérive de notre peuple terrien se poursuit, inexorablement.



À ce rythme-là, les communautés rurales, comme moi, passeront définitivement à l'histoire oubliée dans moins de vingt ans... Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que j'étais à Saint-Grégoire hier : le centre financier commercial Desjardins de la région est maintenant à cinquante kilomètres d'ici. Après les écoles, les bureaux de poste et les églises, ce sont maintenant les caisses populaires (appelées transitoirement comptoirs de service) qui abandonnent les villages. On appelle ça comment déjà chez les Libéraux progressistes et chez Desjardins & Cie? Le reingeneering?



Portrait anticipé du Québec d'après demain. Montréal, Québec et quelques villes dites 'centres' desservies chacune par RBC, CIBC, Loblaws, Wal-Mart, Brick, Home et autres dépôts, Staples alias Bureau en Gros, Canadian Tire, Tim Hortons et autres macdos, et Jean-Coutou International. Terres agricoles et super machineries entre les mains des financiers repreneurs à bons prix dorénavant aux commandes des grandes cultures et de l'élevages industriels, de l'agriculture soudainement devenue rentable. Villages, lieux de villégiature pour gens aisés et âgés. Un bidonville ici et là avec ça?




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