27 février 2005

Un métier?

Les tâches du corps enseignant d'aujourd'hui au primaire et au secondaire sont insurmontables. Les enseignants, en ce sens, héritent des dysfonctions familiales et sociales.


Statistiquement, sur papier, tout baigne dans l'huile. Nous sommes dans la surréalité si caractéristique de l'ex-Union soviétique où, en principe, l'égalité et la liberté régnaient. Le discours officiel convenu sur l'importance de l'éducation demeure un leurre. Le budget de l'État est distribué en fonction d'une échelle de valeurs. Rien de neutre dans les colonnes de chiffres, sauf les chiffres eux-mêmes. Il existe aussi une telle chose qu'une hiérarchie des fonctions.


Un corps enseignant qui se perçoit mal aimé par les autorités, qui se sent épuisé par la tâche, dévalorisé par les élèves, voire manipulé par ses syndicats, est-ce bien ce que souhaite la population?


Denise Bombardier, Un métier noble, dans ledevoir.com, édition du samedi 26 février 2005

26 février 2005

« La supposée culture démocratique »

Bien sûr, dans nos vies, même privées, le marché prend de plus en plus de place; en fait, il prend toute la place. Tout est désormais évalué en chiffres et en fonction de la rentabilité économique : les marchands mènent le monde! Il n'y a plus que le commerce. Voilà le temps du mercantilisme. Les consciences en sont imprégnées. Sans qu'on s'en rende compte, la logique du commerce nous gouverne. On la trouve simple, efficace, rassurante et universelle, et on la laisse nous envahir. La culture n'y échappe pas.


La musique, l'art... Tout doit être commercial. Tout doit se soumettre aux règles du marché. Tout doit être massivement, industriellement vendable pour une contribution tangible, effective et chiffrable à l'enrichissement matériel. Tout doit être conçu, produit, réalisé en fonction d'un seul souci : le profit. Et c'est bien souvent celui d'une poignée de milliardaires qui contrôlent de plus en plus l'industrie des médias. En dehors de ce circuit simple et dogmatique, point de salut! Sinon, c'est la marginalisation, la dépendance, les demandes de subventions, la non-reconnaissance sociale, l'enfer.


Selon ce principe mercantile, la culture, l'art, la pensée, la musique, tout doit se faire racoleur afin d'aller chercher le grand public, la masse des consommateurs, les cotes d'écoute, le plus grand marché. Le dénominateur commun. Il faut que tout le monde en parle. C'est ce qu'on appelle, maintenant, la culture démocratique. Et, derrière l'alibi de cette démocratisation, que retrouve-t-on? Une véritable entreprise de décervelage et d'uniformisation qui est à l'oeuvre. C'est une opération d'abêtissement et d'infantilisation généralisée en Occident, sans doute une autre conséquence de la mondialisation à l'américaine.


Jacques Senécal, «Culture et mercantilisme : décervelage à l'oeuvre», dans ledevoir.com, édition du vendredi 25 février 2005


Admettons que ce portrait brossé par Jacques Sénécal (comme celui d'hier, par François Guité, comme celui d'il y a trois jours par Virginie Luc, comme...) soit juste. Qu'est-ce qu'on fait maintenant? On baisse les bras? On continue à le déplorer par clavier-souris interposés? On se berce dans l'indifférence et on se terre dans la résignation? Non. Non, parce qu'il y a une alternative : l'intellectual entrepreneurship, dont parlait récemment Sébastien Paquet.






25 février 2005

Cela dit...

Si les jeunes d'aujourd'hui sont différents de ce que nous étions, c'est parce que nous avons changé l'environnement dans lequel ils évoluent. N'est-ce pas les baby-boomers, après tout, qui ont débridé les moeurs, déserté les églises, puis succombé aux muses de la consommation? Dans notre course effrénée au matérialisme, nous avons préféré déposer les enfants dans des garderies afin de cumuler les emplois. Jusqu'à ce que la famille éclate.


[...] Érosion de l'autorité, causée sans doute par l'égocentrisme des parents et le refus collectif d'intervenir résolument. Du coup, la responsabilité d'Éduquer les jeunes a été reléguée à l'école. Le flambeau semble avoir été échappé au passage.


[...] Mais comment peut-il réussir avec plus de 30 élèves là ou deux parents n'ont pas réussi avec seulement un ou deux enfants? Sans compter qu'il est généralement laissé à lui-même, dépourvu de ressources ou de formation particulière autres que sa volonté et son jugement. Et naturellement, tout cela est en sus de sa charge de travail professionnelle. De plus, il s'échine dans une école aux méthodes et aux technologies caduques, dont les élèves se foutent de plus en plus. Elle est restée l'école de leurs parents (que plusieurs parents prennent d'ailleurs plaisir à dénigrer), mais dépourvue du lien affectif qui pourrait encore tenir lieu de ciment.


François Guité, L'école, lieu d'éducation ou d'Éducation


Témoignage d'autant plus intéressant qu'il vient de quelqu'un proche du milieu.


Cela dit, j'aimerais bien savoir quel genre d'école nous préparent pour demain les 'négociateurs' du syndicat des enseignants, du gouvernement et des commissions scolaires. L'idée d'une école communautaire -- lancée au Forum des Générations et récemment rappelée par Jean Charest -- y est-elle seulement évoquée? Ne s'accroche-t-on pas plutôt à conserver les acquis (tradition syndicale oblige) d'un système pourtant mésadapté aux réalités actuelles?


C'est quand même incroyable qu'en 2005, l'avenir au quotidien de l'éducation de nos jeunes soit laissé entre les mains d'une poignée de négociateurs inconnus qui n'ont aucun compte à rendre à la population, pas même aux élus!





24 février 2005

L'EAU

Influence de mon patronyme souvent déformé par mon entourage, sans doute : j'ai toujours eu un intérêt mitigé pour l'eau. Enfant, j'aimais les baignades estivales dans la rivière Saint-François; j'aimais moins y pêcher la barbotte cependant, me contentant de 'tenir une ligne' pour les autres. J'ai appris à nager à l'adolescence et me suis rendu jusqu'au grade intermédiaire de la Croix Rouge.

Jeune, je n'aurais jamais pensé devoir un jour acheter l'eau en bouteille, ne pas pouvoir me baigner dans une rivière et ne plus pouvoir y pêcher faute de poissons sinon empoisonnés. Les générations précédentes nous avaient laissé de l'air pur, de l'eau potable, de la terre vivante.

Que laisserons-nous à nos descendants?

Dans le mille

I have a handful of deeper ideas that have been sitting in my backpack for a long time and that need to be given a chance to blossom. The last thing I want, however, is to be a lone nut working my ideas out in a vacuum, which is an easy trap to fall into. I need to engage with other people, to listen and talk, both to shape the ideas, connect them to others' visions, and to help them spread out.


I believe it's about intellectual entrepreneurship, really. When you stop to think about it, not so many people are listening closely. Some of the most promising innovations are challenging and won't go very far just by virtue of their intrinsic strength. They need proselytes to make their way into widespread acceptance. They need to be articulated clearly, and presented from different angles. Their significance has to be explained in different ways to different people. It's challenging work, but my feeling is that too few people are doing it. I think this is a role I want to take on at this point.

Sébastien Paquet, Reflecting on my role via Remolino


Voilà qui m'encourage à poursuivre l'élaboration de mon blogue-projet.

23 février 2005

Quand d'autres savent si bien le dire...

Notre monde s'est réduit comme une peau de chagrin par des moyens de communication sidérants et, paradoxalement, les hommes n'ont jamais été aussi isolés. La « personne » se voit réduite à n'être qu'un « individu », électron libre ivre de son bonheur immédiat et matériel. Messie de lui-même, l'homme occidental s'est converti en sa propre promesse. La modernité rime avec liberté, c'est-à-dire jouissance individuelle.


Plus que d'autres nations, nous avons reçu en héritage des Lumières la foi dans la liberté et l'universalisme de la démocratie. Quel visage offre-t-elle aujourd'hui?


« Dans notre société démocratique, nous voici confrontés à un nouveau processus de décivilisation », écrit MIGUEL BENASAYAG, philosophe et psychanalyste argentin. « L'idéologie des Droits de l'Homme est devenu le véhicule de la fureur de vivre, de l'explosion de l'individualisme et de cette volonté de liberté totale qui ne fait aucune place à autrui, ni à la construction d'un monde commun » (Le Mythe de l'individu, Ed La Découverte).


Les seuls traits d'union (qui nous séparent en réalité) sont le divertissement à outrance et une frénésie de la consommation. Par démission, nous restons hypnotisés devant des postes de télé ou d'ordinateur qui nous rendent sourds au dialogue avec nos enfants et diffusent en nous un sentiment d'indifférence et d'impuissance. On remplit de bruits et d'images le vide et le silence qui nous effraient.

VIRGINIE LUC, Question



22 février 2005

Du tête à tête au tête à têtes

Parallèlement à Franchement!, je suis en train de concevoir un blogue centré sur un projet qui impliquerait la collectivité environnante. Il s'agit là d'un double défi. Le premier : élaborer un projet collectif en utilisant le blogue. Le deuxième : intéresser, via ce blogue, suffisamment de mes concitoyennes et concitoyens au projet pour qu'il puisse se réaliser.



Passer du blogue en tête à tête au blogue de tête à têtes...



Je crois être capable de relever le premier défi avec un peu de temps; après tout, ça reste du tête à tête. Quant au deuxième, occasion en or de tester le potentiel rassembleur et mobilisateur du blogue (le tête à têtes).


21 février 2005

Peut-on concevoir et développer un projet en utilisant un blogue?

Je place ce blogue en mode semi-hibernation pour quelque temps.



Pour mettre en branle un autre blogue. Un blogue expérimental qui sera entièrement dédié à une idée de projet. Est-ce que le blogue est un bon moyen pour concevoir, présenter et même contribuer à réaliser un projet d'envergure bien concret? Je ne connais pas de précédent qui puisse m'amener à répondre oui ou non à cette question. On verra bien. Si cela vous intéresse de suivre ou de participer activement à l'aventure : bienvenue, sans restriction!



L'adresse du blogue apparaîtra ici dans quelques jours, le temps d'y regrouper les éléments de base nécessaires à une bonne compréhension du projet et d'en déterminer au moins provisoirement les jalons.



Ah! J'allais oublier un tout petit détail : le genre de projet. Il s'agit de l'acquisition d'une église actuellement à vendre pour en faire un lieu de revitalisation économique, écologique et communautaire.



19 février 2005

« L'idée de l'école communautaire »

    « Nous réunissons dans un même ministère les responsabilités de l'Éducation et du Sport et des Loisirs. Ce regroupement répond à l'idée de l'école communautaire, un des grands consensus du Forum des générations. Il est cohérent avec le nouveau régime pédagogique qui accorde plus de temps à l'activité physique à l'école. » (Discours de Jean Charest, à l'occasion de son remaniement ministériel)


L'école communautaire est un concept encore bien théorique. Dans la réalité, nos écoles sont plutôt des enclos contrôlés à distance (une cinquantaine de kilomètres, dans notre cas). Je parle de ce que je connais, bien sûr; l'école de votre quartier est peut-être transparente et ouverte.



Pourquoi l'école 'bien public' ne pourrait-elle pas devenir communautaire, c'est-à-dire l'école 'place publique'. Un lieu ouvert aux rencontres sans égard à l'âge, un lieu d'échange et de partage d'idées, un lieu d'élaboration de projets utiles pour la collectivité, un lieu où pourraient être exposés les 'trésors' cachés dans les greniers et les sous-sols autour, un lieu de transmission de l'histoire locale par celles et ceux qui l'ont vécue, un lieu d'appropriation des nouvelles technologies par les 'vieux' grâce aux plus jeunes, un lieu d'accès à la culture d'ailleurs via une infrastructure de télécommunication vidéo à distance... (c'est là un aperçu de ma conception de la pédagogie ouverte.)



Qui sait? Le passage sémantique de l'environnement au développement durable aura peut-être un effet d'entraînement en éducation : l'école primaire ou secondaire devenant une place communautaire, la commission scolaire devenant un centre de développement communautaire, le transport scolaire devenant le transport communautaire...



On peut au moins l'imaginer au lendemain d'un remaniement ministériel accompagné d'un message qui mentionne explicitement « l'idée de l'école communautaire ». Ça fait oublier un moment la réalité des fermetures au coeur des villages et des quartiers. Ça fait oublier que nos petites villes ont de plus en plus l'allure de trous de beignes aux garnitures périphériques à consonnances étrangères. Les fermetures d'usines. Les fermetures d'églises. Les fermetures de petits commerces. Les fermetures de nos caisses populaires locales. L'abandon des fermes familiales... Les enfants et les redevenus enfants bien enfermés chacuns dans leurs centres. Et notre propre enfermement communicatif.



L'idée de l'école communautaire pourrait secouer l'indifférence locale et combler l'insatisfaction globale, quoi... (Ce qu'un simple remaniement ministériel peut me rendre utopiste!)



17 février 2005

L'information fourre-tout

Les médias électroniques -- radio, télé, fils de presse Internet -- nous font passer en moins de temps qu'il le faut pour en prendre conscience d'Auschwitz à Michael Jackson, de la LNH au débat sur le mariage gai, de Wal-Mart à Kyoto, d'un otage en Irak aux passoires d'Hydro-Québec... Une suite non-stop d'images et d'expressions d'émotions mi-vraies mi-fausses apparemment sans liens dont il est impossible de véritablement décoder la valeur et le sens. Information patchwork, information girouette, information clinquante.



C'est ainsi que cette semaine, l'avenir de notre Terre a vite fait place en manchettes à l'avenir du hockey commercial, la protection de notre Planète à celle des installations d'Hydro-Québec et la détérioration de notre Environnement à celle des XBox.



Comme si la qualité de nos vies était liée aux cotes d'écoute et aux indices boursiers.


16 février 2005

La Bourse ou la Vie

    Pierre Dansereau et Jean Ouimet nous proposent aujourd'hui un projet de société. Nos leaders sont-ils à l'écoute?




La croissance économique actuelle pousse vers l'effondrement des ressources renouvelables (forêts, poissons, terres arables) nécessaires au développement de l'humanité et des perturbations majeures des écosystèmes planétaires avec les changements climatiques, la contamination des eaux, des sols, des océans et de l'air.

(...)

Si nous sommes incapables de passer à un développement durable des richesses planétaires, nous, nos enfants et nos petits-enfants vivrons un effondrement de nos qualités de vie et un retour au Moyen Âge, et ce, pour des siècles, c'est-à-dire jusqu'à ce que la nature retrouve un nouvel équilibre de l'écosystème terrestre.

(...)

Pour neutraliser ces forces conservatrices du statu quo, nos sociétés doivent s'engager, avec un nouveau contrat social, à changer leurs habitudes de consommation et leurs modes de production. (...) La réalisation du contrat social doit être accompagnée d'un processus politique de droit de veto de la population sur les choix de société pris par l'État.

(...)

Nous devrons imaginer d'autres modes de vie que l'American way of life, des modes de vie à partir desquels nos enfants pourront faire d'autres pas pour atteindre l'équité dans le partage des richesses planétaires entre les nations riches et les nations pauvres.

(...)

Une éducation permanente de la population sur les limites écologiques, sociales et économiques à respecter pour un développement durable, en plus d'instaurer une démocratie cognitive, permettrait de prendre collectivement de plus sages décisions et d'instaurer une société du savoir.

(...)

Nous invitons la population québécoise à envisager un tel virage et à en débattre publiquement afin que nos enfants et nos petits-enfants puissent retrouver un espoir en l'avenir plutôt que de blâmer les personnes aux commandes d'avoir sacrifié leur avenir, aveuglées par les mirages de la croissance économique actuelle.

15 février 2005

L'heure de la récréation

« La société se dirige de plus en plus vers la récréation, particulièrement à la retraite, et la sexualité n'échappe pas à cette tendance. En 20 ans, on est passé d'une sexualité de procréation à une sexualité de récréation. »


Michel Campbell, sexologue clinicien à Louise-Maude Rioux Soucy : Réapprendre à s'aimer, dans ledevoir.com, édition du lundi 14 février 2005.


Le problème avec la récréation, c'est cette maudite cloche qui en annonce immanquablement la fin juste au moment où on commence à s'amuser.


14 février 2005

Prémisse

Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour celle qu'on aime.

Il n'y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour celui qu'on aime.

Mais il faut d'abord que celle et celui se rencontrent.



13 février 2005

Rien que pour voir...

Hier, première vraie neige de l'hiver. J'en ai profité pour marcher le long de notre rivière gelée. Et j'ai pris quelques photos comme pour éterniser ce moment. C'est tellement apaisant la neige qui tombe ou qui vient tout juste de tomber.



J'en ai profité pour expérimenter Flickr.com. Si la nature sauvage sous neige vous manque, jetez un coup d'oeil à droite, sous Voyons voir...


12 février 2005

Le cul-de-sac patrimonial

    En marge du reportage de Zone libre cette semaine : « Patrimoine religieux : l'avenir de notre passé ».


Notre patrimoine est surtout religieux, constitué d'églises, de chapelles et de couvents. Périodiquement, depuis une dizaine d'années, il fait l'objet d'un questionnement dans les médias quant à son avenir : faut-il restaurer, recycler ou démolir nos églises désertées?



Le sort de cinq cents d'entre elles est déjà réglé : vendues. « Ce ne sont que des bâtiments, après tout! » À entendre certains, « il faut démolir ces vestiges du catholisme triomphant pour des raisons évangéliques ». Mille églises et autant de couvents attendent un peu partout au Québec qu'on statue sur leur sort à plus ou moins long terme : elles sont devenues un fardeau financier trop lourd à porter pour la hiérarchie et les fidèles catholiques encore pratiquants (5 % de la population, selon Zone Libre).



Faut-il conserver ce patrimoine? Si oui, qui doit payer pour en faire l'acquisition, la restauration et l'entretien. Ne faut-il pas plutôt le recycler, le démolir, s'en débarrasser?



Pourquoi n'aborde-t-on pas la question de notre patrimoine plus franchement. Tout ramener à l'argent est un faux problème : il y a toujours de l'argent pour ce qui est jugé prioritaire par la population (pensons seulement à tout cet argent de la collectivité investi dans le mythe de la santé).



La vraie question s'adresse à nos tripes : faut-il garder ou faire disparaître ces témoins qui nous rappellent à chaque tournant nos racines, nos valeurs en tant que peuple, notre besoin profond de sens?



Nos ancêtres, bien plus pauvres que nous, avaient fait leur choix : celui d'assurer leur pérennité par les enfants, l'église et la langue. C'était là leur plus grand investissement et leur seule richesse.



Nous avons fait tranquillement le choix de couper avec notre histoire en l'enseignant peu ou pas et en la dévalorisant, de sacrifier une grande partie de notre autonomie économique en laissant aller nos ressources pour des petits pains, de laisser détériorer notre environnement par une minorité de profiteurs dont nous admirons le train de vie, de laisser s'étioler notre tissu familial et les valeurs qui y sont rattachées pour satisfaire nos égos, d'investir individuellement et massivement dans le paraître, l'inutile, le hasard et l'évasion en même temps que d'investir collectivement et aveuglément pour en colmater les conséquences néfastes sur notre santé physique et mentale...



Soyons logiques et cessons de tergiverser sur l'avenir de notre patrimoine religieux. Un peuple qui se laisse ainsi mourir à petit feu n'a pas besoin de monuments patrimoniaux gênants qui n'ont aucun sens pour la génération actuelle et qui en auront moins encore pour les quelques-unes encore à venir.




11 février 2005

Bien entendu

Quand on a perdu le regard et le vocabulaire de l'enfance, on a tout perdu.


Charles Aznavour au journaliste Achille Michaud


 


Nous avons maintenant des chemins de fer, des canons et des fusils, mais nous ne savons plus d'où nous venons et qui nous sommes.


Dernière parole du jeune empereur dans le film de Tom Cruise, Le dernier des samourai


 


Il y a en chacun de nous un consommateur et un citoyen. Et c'est toujours le consommateur qui a le dernier mot.


Jacques Nantel, professeur aux HEC, dans une entrevue au RDI au sujet de la fermeture annoncée du Wal-Mart de Jonquière


 


La puissance du capitalisme moderne viendrait-il de cette capacité à créer chez chacun de nous cet aveuglement qui nous amène à faire au quotidien le contraire de ce que nous souhaitons, pensons et voulons?


Bernard Girard



10 février 2005

Le temps des espoirs

Avec un accent et une espace, on peut passer « des espoirs » aux « désespoirs » et vice versa. L'espace du temps et l'accent humanitaire.



Ces jours-ci, le temps humain est aux espoirs.



Espoir de paix en Palestine. Espoir de réconciliation en Irak. Les réfugiés du Darfour espèrent l'aide internationale. Les Italiens et les Polonais espèrent que leur pape ira mieux... Au 'pays des fermetures', le Saguenay-Lac-Saint-Jean, on espère un redressement économique. Les amateurs de natation espèrent que tout n'est pas perdu pour les Championnats du monde à Montréal... Les amateurs de hockey espèrent que leurs vedettes en reviendront. Les amateurs de vins et de spiritueux espèrent que leur SAQ rouvrira... Les parents espèrent beaucoup des réformes du ministre de l'Éducation. Les malades espèrent beaucoup des réformes du ministre de la Santé. Les employés de l'État espèrent beaucoup des négociations...



Ces jours-ci, tout le monde espère. Même Les Bougon, hier. Sans doute parce qu'espérer, « c'est aussi ça la vie ».



Si j'en parle aujourd'hui, c'est qu'ici, il neige à plein ciel. Je l'espérais tellement cette neige! Pour que ce soit enfin l'hiver pour vrai. L'hiver à la pelletée.



C'est tellement important l'hiver pour pouvoir espérer le printemps.



09 février 2005

Tout feu, tout flamme

Ce que j'apprécie du blogue, c'est son potentiel d'authenticité. Quand je fais le tour de ma blogosphère chez Bloglines, je n'ai qu'une question en tête : « Qu'est-ce qui inspire qui aujourd'hui? » Une tournée sans formalités. Pas besoin de demander à tout bout de champ « Comment ça va? » ni d'attendre de se faire dire « Ça va! » pour poursuivre. Pas besoin de manifester ces préoccupations formelles préjudiciables à la communication inspirée : « 'me semble que t'as l'air ci ou ça! » ou « Et puis, ton magasinage d'hier? ta visite chez un ou chez l'autre? » Pas besoin de ces tournages autour du pot : « Dis donc, t'as regardé le canal D, E ou H? ou les informations de 17, 18 ou 22 heures? As-tu vu un tel blablabla blablabla... Et qu'est-ce que t'en penses? » Non. Le blogue, c'est du direct, du droit au but, de l'authentique (la plupart du temps). En passant : Bon anniversaire, Martine! Tu dois bien être notre doyenne?



Ni vu ni connu, mon blogue vient de fêter son 3ième anniversaire! Le premier billet fut nerveusement rédigé le 5 février 2002. 789 billets plus tard, me voici encore, avec mes coups de coeur, mes coups de tête, mes projets et mes nombreux désirs. ;-)


Quand tu blogues, tu te demandes pas si l'autre est homo ou hétéro, célibataire ou parentale bi ou mono, mesure six pieds ou quatre pieds six... Si elle ou il a des creux, des rides ou des rondeurs, un gros compte en banque ou rien en poche, les cheveux blonds, blondis naturels ou dégrisés avec pour hommes seulement... Tu te fous pas mal qu'elle ou qu'il ait un abonnement au gym, chez un psy ou chez une esthéticienne, une ou six ou pas de cartes de crédit, une mercedez, une écho, un vélo ou sa carte de la stm.. Si c'est un bac, un dec, un des ou un diplôme d'employé modèle du mois qu'il y a d'accroché sur son mur... Tout ce qui t'intéresse c'est : « Qu'est-ce qui l'inspire aujourd'hui? »



Et comme l'authenticité attire et provoque à la fois l'authenticité, tu te sens tout à fait à l'aise chez une de ne lire que le titre parce qu'il ne t'annonce rien qui te vaille (Tout feu, tout flamme!...), chez l'autre de ne lire que la première phrase parce que tu sens qu'elle te mènera là où tu ne veux pas aller ou là où tu ne veux pas retourner... jusqu'à ce que -- les grandes inspirations finissant toujours par se rencontrer dans la blogosphère -- tu te laisses prendre, séduire, envoûter et te mettes à lire, relire et rerelire le billet inspiré inspirant dont tu avais justement besoin à ce moment précis pour alimenter tes moments d'après. Et le plus beau de l'affaire, c'est que tu peux faire ce choix sans choquer, sans brimer, sans frustrer ni faire pleurer, sans provoquer de vains espoirs ni d'euphories paralysantes : les blogueuses et les blogueurs savent que l'inspiration est capricieuse et discrète et qu'elle l'est d'autant plus qu'elle est authentique, que ce qui déplaît peut aussi plaire, que tout peut arriver à qui sait bloguer tout feu, tout flamme à tous vents...




08 février 2005

L'impudence d'un hebdo régional

Vous ne lisez peut-être pas les hebdos régionaux gratuits? Moi, si. (En fait, je ne rate aucune occasion de 'parfaire mon instruction' gratuitement.) Celui de notre région a pour nom L'Avenir & Des Rivières du Groupe Le Canada Français. J'ai déjà parlé de leur éthique douteuse sur le plan de la concurrence commerciale (Le chat sort du Publi-sac). Je parlerai aujourd'hui de leur impudence.



Un geste tout à fait normal dans une société civilisée : la publication d'un faire-part à la suite du décès d'un proche. Un encadré renforcé de quelques fioritures, une photo en médaillon, l'avis nous annonçant le jour de son dernier jour et le jour où auront lieu les derniers adieux avant qu'il ne rejoigne la phalange des humains oubliés... Un geste tout à fait normal dans une société qui respecte ses morts parce qu'elle croit en la vie et espère en la survie.



Dans L'Avenir & Des Rivières, on place les faire-part dans les pages des petites annonces avec les escortes et les agences de rencontres. Je veux bien croire que ça fait aussi partie de la vie mais on pourrait au moins en faire la promotion ailleurs qu'auprès de nos morts. C'est carrément de l'impudence que cette juxtapositon déplacée. Et de l'impudence récurrente.



En effet, deux fois durant les quinze derniers mois, j'ai porté cette façon de faire inacceptable à l'attention de M. Charles Couture, directeur du journal et directeur général adjoint du Groupe Le Canada Français. Avec chaque fois le même résultat : quelques semaines de décence puis retour à l'impudence. Le naturel revient au galop.



J'en parle aujourd'hui publiquement parce que c'est assez. Laissons au moins nos morts en paix! Je ne peux plus voir « Zoé enchanteresse et dominatrice » ou « le réseau érotique le plus osé en ville » hanter nos morts et titiller ceux qui les pleurent. Au nom de la plus élémentaire décence, Monsieur Couture, au nom de ce qui vous reste de dignité, au nom de nos morts qui méritent au moins qu'on les laisse en paix!





07 février 2005

Pédagogie ouverte, écoles entrouvertes et négociations derrière des portes closes

    Suite d'une réflexion déclenchée par un billet de Mario sur les aléas de la réforme de l'enseignement : Quel paradigme? En post-scriptum, Mario est on ne peut plus clair sur ses attentes et ses appréhensions face à la réforme pour laquelle les profs ne sont pas suffisamment préparés :


J'ai crainte que la réforme ne deviennent qu'un changement de livre de référence. Le modus operandi de l'enseignement coopératif, la procédure de l'enseignement par projet et le code d'utilisation des tableaux de programmation, ça continue de rimer avec le paradigme de l'enseignement et je vois que dans certains milieux, on oblige les gens à essayer la pédagogie ouverte comme "une autre recette" qui est à la mode de ce temps et bien prometteuse de résultats. Et ces résultats seront désastreux mon cher... parce que ce ne sont que des outils, pas des recettes. Je comprends de la réforme qu'on demande aux pédagogues de s'offrir d'autres outils que le "je parle et tu m'écoutes". Je comprends aussi qu'on souhaiterait que les stratégies soient mises au service des intentions éducatives d'enseignants chevronnés qui SAVENT accoller des contextes signifiants aux tâches à offrir aux élèves. Utiliser ces outils de la pédagogie ouverte sans déménager de perspective risque d'être encore pire que de voir du contenu explicite en dehors d'un contexte signifiant.

Si toutes les directions d'école et les administrateurs scolaires de tous niveaux ont la même conscience des défis qu'impose la réforme aux enseignants, on peut cependant espérer que les mentalités évolueront dans le bon sens parce qu'ils mettront en place les moyens pour les faire évoluer. Là-dessus, pas un mot de Mario, sinon ce cri du coeur lucide et inquiet face à l'avenir de l'école :



Le fait est que nous ne pouvons nous gargariser que de nos réussites. J'ai bien peur que l'école doive faire face à des défis de taille dans les prochaines années pour rester signifiante auprès des jeunes qui la fréquentent, de leurs parents qui "la font fréquenter" et de la société qui la finance et "en profite" (théoriquement) par après.


La partie est loin d'être gagnée, d'autant plus qu'elle se joue dans un contexte d'incohérence totale. D'une part, la réforme met de l'avant une pédagogie ouverte axée sur une participation plus active de l'élève à son apprentissage; d'autre part, les profs, dixit Mario qui est bien placé pour le constater, sont encore dans le paradigme de l'enseignement magistral.



Mais il y a plus. Une pédagogie plus ouverte exige une école plus ouverte. Or, nos écoles sont à peine entrouvertes. Connaissez-vous une seule école qui a développé une réelle synergie avec la communauté dans laquelle elle a pignon sur rue? Les écoles ne sont-elles pas trop souvent des déversoirs d'enfants comme le sont aussi, trop souvent, pour nos plus jeunes les CPE (centres de la petite enfance) et, pour nos vieux, les CGA (centres du grand âge) et les CHSLD?



Et il y a plus encore. Une pédagogie plus ouverte est impensable sans une plus grande ouverture de la société même et de ses gouvernements. Or les règles du jeu au quotidien sont édictées à une table de négociation unique où tout se passe dieu sait comment mais à huis-clos comme au temps de la grande noirceur. Comme si on ne faisait pas le lien entre la convention collective qu'on veut imposer et la pédagogie qu'on veut implanter afin que l'école « reste signifiante auprès des jeunes qui la fréquentent, de leurs parents qui "la font fréquenter" et de la société qui la finance et "en profite" (théoriquement) par après ».



On demande aux profs de respecter à la lettre la convention collective qu'on leur a concoctée (et un temps décrétée), de suivre méticuleusement les directives administratives auxquelles ils sont astreints en tant que gestionnaires de classe, de se conformer aux horaires qu'impose l'informatique, la cafétéria et le transport scolaire, de suppléer en douceur à l'absence ou aux carences parentales, de relever le défi de la compétition des Gameboy et des iPod, du Web et de Google, de CKOI, CHOI et d'ExpressVu... et d'enseigner, d'enseigner ainsi imbriqués. Et, bien coincés comme des chevilles d'assemblage, de mettre en branle une pédagogie plus ouverte!



Il est peut-être temps qu'on regarde le décrochage, la violence, l'alcool, la vitesse au volant, la drogue, la sédentarité, l'obésité et le suicide chez les jeunes ainsi que la dénatalité autrement que par la lorgnette des statistiques et qu'on fasse les liens de cause à effet qui s'imposent. Une pédagogie plus ouverte, oui. Mais ce n'est pas sérieux sans une école plus ouverte, sans une société plus ouverte, sans des négociations plus ouvertes, sans plus d'oxygène (encore l'effet du smog)... Ou alors quelqu'un se paye tout en se payant notre tête quelque part!



    Tu ne te trompes pas, Normand : « l'absence d'une philosophie de l'éducation se fait cruellement sentir. »




06 février 2005

Le Québec drabe

    Je ne sais pas si c'est l'effet du smog persistant -- encore aujourd'hui -- mais je vois le Québec bâti de plus en plus drabe. (Au Québec, drabe est un synonyme de beige fade et terne; en France, on dirait fadasse, je crois.)


Je ne voyage pas beaucoup -- comme la plupart des travailleurs dits autonomes qui, en fait travaillent à leur compte, c'est-à-dire comme des forcenés pour venir à bout de payer leurs comptes. Pas beaucoup mais suffisamment pour constater que le paysage architectural québécois devient de plus en plus drabe. J'en donnerai trois exemples.



Vous avez vu ce qui se construit en face du Wal-Mart, du Maxi et de leurs commerces satellites à Saint-Jean-sur-Richelieu? Éparpillés en damier dans le champ, de gros cubes de briques surmontés de simili larmiers pour déjouer artificiellement la monotonie visuelle. Des blocs à condos qui se ressemblent tous à peu de choses près et qui ressemblent aussi aux précédentes constructions du genre qui proliféraient il y a une décennie le long de l'autoroute de la Vallée-des-Forts qui coupe la ville en deux. À croire qu'il n'y a plus d'architectes au Québec (ou qu'il n'y en a qu'un de l'école drabe ou dont l'imagination est tarie). Vous me direz : mais ça se vend bien pourtant! Je répondrai : quel autre choix offre-t-on aux acheteurs?



Vous avez vu ce qu'on achève de construire à proximité du boulevard des Galeries d'Anjou dans l'est de Montréal? Des dizaines sinon des centaines de tours à condos clonés et empilés à vous faire demander comment les gens qui y logent s'y retrouvent! Qu'est-ce que c'est que ce parti-pris pour la monotonie domiciliaire drabe imposée aux acheteurs par les corporations de développement qui ne semblent connaître que le pareille au même?



Anjou et Saint-Jean-sur-Richelieu ne font pas partie de vos itinéraires habituels? Qu'à cela ne tienne. Des 'développements' aussi drabes ont certainement surgi quelque part sur votre route : la tendance est au drabe profitable.



Et que dire de ce qu'on achève de faire dans les nouveaux secteurs commerciaux de toutes nos petites villes? On y fait carrément du copier-coller architectural (si on peut appeller ça de l'architecture!) pour, dit-on, préserver l'identité corporative des Tim Horton, Super C et compagnies... Comme par hasard, l'identité corporative à clones multiples est plus rentable que l'originalité architecturale. Sans compter que les modèles clonés sont pour la plupart aux antipodes de l'architecture caractéristique du Québec... Serait-ce la globalisation de l'architecture et la disparition à brève échéance de cet autre fondement de l'identité d'un peuple qu'est son architecture?



Parenthèse. L'architecture des églises et des couvents qui constituent notre patrimoine religieux était tout sauf drabe. Lorsqu'on aura fini de les démolir ou de les transformer à des fins corporatives, le Québec deviendra définitivement et irréversiblement drabe.



« Drabe, mais rentable! »



Rentable pour qui?


 



    J'ai voulu savoir si d'autres avant moi avaient eu leur période drabe... Gilles (en vrac) et La grande rousse ont parlé de « la banlieue drabe »; Zénon, d'un père « vêtu un peu drabe »; Benoit Munger, de « la ville drabe »; France, des « sites en format drabe ». Chez le populaire Patrick Brisebois, un commentateur trouve son bureau « bien drabe », alors que Guy Verville, lui, trouve l'intersection Parc et Van Horne « bien drabe ». Normand Provencher considère qu'il n'y a « rien de plus drabe » à Québec, avec le bunker de la Grande Allée, que le PEPS de Laval...


    Espérons que le smog tire à sa fin!

05 février 2005

SMOG ACID TRIP


 

Smog de Montréal
La beauté du smog de Montréal

 


En français, on devrait utiliser l'expression smog acide.


smog acide n. m. État de l'atmosphère caractérisé par la présence simultanée de polluants gazeux ou vésiculaires à propriétés acides et d'un aérosol de fumées retenu dans un brouillard. (Grand dictionnaire terminologique)

 

Smog de Mexico
La beauté du smog de Mexico

 


Lorsque nous entendons le mot «smog», la plupart d'entre nous pensent à cette «soupe» chimique qu'on observe souvent au-dessus des régions urbaines sous la forme d'une brume jaune brunâtre. Cependant, le smog n'est pas toujours visible. Il s'agit en fait d'un mélange de polluants atmosphériques comprenant des gaz et des particules qui sont trop petites pour qu'on puisse les voir. Bien que le smog soit souvent produit dans les grandes villes, sa concentration peut être tout aussi élevée, sinon plus, dans les collectivités suburbaines et rurales. (...) Le smog peut irriter les yeux, le nez et la gorge, ou il peut rendre plus graves des problèmes cardiaques ou pulmonaires. Dans certains cas exceptionnels, il peut entraîner une mort prématurée. (Le smog et votre santé)

 

Smog de Los Angeles
La beauté du smog de Los Angeles

 



Hier, en passant devant l'usine d'épuration des eaux de Saint-Jean-sur-Richelieu sur l'autoroute de la Vallée-des-Forts (!), je me suis demandé à quoi ressembleront les usines d'épuration de l'air au siècle prochain.


 

Smog de Beijing
La beauté du smog de Beijing

 


Génération X, génération Y, génération Z...
Et après la génération Z?
Après, on recommencera avec la génération A.
La génération asthmatique.


 

Smog de Tokyo
La beauté du smog de Tokyo

 


Essai de redéfinition du smog


  • L'odeur durable du développement.

  • Un faible échantillon de l'air que nous laisserons en héritage à nos descendants.


 

Smog de Saint-Armand
La beauté du smog de Saint-Armand

 


 






04 février 2005

Quel paradigme?

    Mario titrait ainsi tout de go un récent billet : Utiliser une pédagogie plus ouverte peut s'avérer dangereux dans le paradigme de l'enseignement. Les doigts me sont tombés de la souris. J'ai lu, relu, imprimé, surligné, annoté ce billet... J'ai pensé y aller d'un commentaire... Puis me suis ravisé : Jean Trudeau, de quoi tu te mêles! Mais ce matin, ça me tenaille encore... Le prof déchu sourd en moi et m'exaspère : il faut que je vide mon sac. Tu m'excuseras, Mario, ça ne te vise pas personnellement mais ça me prenait un interlocuteur 'bien placé'...


D'ici tout semble bien aller dans 'le monde de l'éducation' : du moins si on se fie aux apparences locales et au proverbe populaire 'pas de nouvellles; bonnes nouvelles'. Ce n'est pourtant pas le portrait qu'en fait Le Figaro (cité par Mario) ni celui qu'on nous a présenté dans de récents reportages sur le décrochage des élèves et des jeunes profs...



Le milieu scolaire est en pleine réforme : belle occasion pour effectuer un virage salutaire... (J'ai parcouru le Programme de formation de l'école québécoise, Enseignement secondaire, premier cycle (pdf) : il y a là un cadre pédagogique emballant -- je dis bien un cadre!)



Je ne comprends pas trop la mise en garde de Mario qui incite à mettre la pédale douce sur 'une pédagogie plus ouverte' parce qu'elle pourrait s'avérer dangereuse dans le paradigme de l'enseignement. En fait, ce que je ne comprends pas trop, c'est le paradigme.



PARADIGME, subst. masc. C. ÉPISTÉMOL. Conception théorique dominante ayant cours à une certaine époque dans une communauté scientifique donnée, qui fonde les types d'explication envisageables, et les types de faits à découvrir dans une science donnée. (TLFi)


L'école de 2005 serait-elle encore 'magistrale'? Serait-ce cette magistralité qui est en danger? J'espère avoir mal saisi. Je lis bien pourtant qu'il faudrait « aider les gens à déménager dans le paradigme de l'apprentissage »... Le plus grand défi de la réforme serait donc qu'il faut passer d'une école qui valorise l'enseignement à une école qui valorise l'apprentissage, d'une école où les profs enseignent à une école où les élèves apprennent?



Et il y aurait de la résistance dans le milieu à ce que l'école devienne ce qu'elle devrait être, de la résistance à ce qu'« avant tout les jeunes prennent une part plus active dans leurs apprentissages ». Est-ce que je comprends bien?



Mais n'est-ce pas là la base même de la pédagogie active, bondieu; et jusqu'à preuve du contraire, la pédagogie, c'est ce qui fait qu'un prof est un prof. Ou je ne comprends plus rien à rien dans le merveilleux monde de l'éducation d'aujourd'hui.



La 'réforme' -- si je me fie aux principes qui la sous-tendent -- n'est-elle pas plutôt une chance inouïe pour les profs de pouvoir enfin « rendre les élèves enthousiastes et actifs dans leurs apprentissages ». Où y a-t-il donc un danger là-dedans! Les profs, les vrais, ne demandent pas mieux : j'en mettrais ma main au feu.



Dis, Mario, le danger, il ne serait pas ailleurs? Tu écris : « Les enseignants, il faut les aider à diminuer le nombre de leurs certitudes. » Leurs certitudes ou celles qu'on leur a imposées en faisant d'eux avant tout des gestionnaires de classe et des gardiens d'enfants?



Les profs, j'en suis convaincu, ne demandent pas mieux que de pouvoir amener les jeunes à prendre une part plus active dans leurs apprentissages. Mais je suis tout aussi convaincu que pour ce faire, il ont besoin qu'on fasse confiance à leur professionalisme. Ou alors je suis complètement dans le champ, conséquence sans doute de toutes ces années vécues à la campagne...




Jean Trudeau, de quoi tu te mêles! Contente-toi donc de bloguer sur la pluie et le beau temps...





03 février 2005

La Méduse et Cassandre



(...)


Mme la ministre, au musée du Louvre, il y a une statue de Cassandre. Une statue qui, comme beaucoup de vestiges, nous est arrivée démunie de ses membres et de sa tête. Simplement un torse. Celui de Cassandre. Ce torse, qui n'est rien d'autre qu'un bloc de marbre, semble dire : vous pouvez décapiter toute tentative d'existence de moi, mais il restera, ne serait-ce que dans la tournure de mon thorax, suffisamment de mystère pour que survive l'incompréhensible présage.


Cet incompréhensible présage, il est précisément ce qui forme la mémoire collective. L'histoire se souvient des bourreaux, des juges et parfois des victimes, mais elle n'oublie jamais ceux et celles qui, cherchant à comprendre les trois, ont su n'être aucun d'entre eux. Ceux-là, on peut les appeler les fous, les poètes et les penseurs. Votre absence de dimanche soir nous annonçait votre décision de les abattre. Baissez votre jeu, faites-nous voir votre masque. Il a, peut-être, les traits ahuris de la Méduse.


vivre et payer pour...

    sur un air de rapt

vivre

vivre pour...

vivre pour payer

payer pour...

vivre



    payer

    payer sans...

    payer sans vivre

    vivre sans...

    payer mais...

    finir par payer pour...

    vivre vivre


vivre

et payer pour...

payer et vivre pour...

payer mais...

vivre vivre vivre



    vivre

    jusqu'à

    ne plus

    pouvoir

    payer

    pour...



02 février 2005

Vérité et mensonge

Quelque part entre la vérité et le mensonge, il y a l'engagement et l'honneur.



Le billet de Virginie Luc, L'art est un mensonge qui dit la vérité, le journalisme une vérité qui dit un mensonge, est cinglant pour les médias et pour notre société qu'ils reflètent.



La dérive de « la » presse n'est que le reflet d'un phénomène qui la dépasse largement. Celui d'une société qui ne tourne pas très rond. Ou justement, qui tourne trop en rond. L'individu occidental, dans sa quête effrénée du bonheur immédiat, est devenu le centre des préoccupations : chacun défend ses droits, son bien-être physique et psychique. On s'en tient à soi, à ses préoccupations immédiates (au mieux, à son pays). On s'adore soi-même. On est dans l'ère du « moi je », immanquablement névrosé. Notre société occidentale s'est coupée de toute transcendance. Il n'y a pas (plus) de projet commun et unificateur, plus d'élan vers l'extérieur, vers ce qui nous dépasse... On a sacralisé l'individu qui finit aujourd'hui par s'asphyxier lui-même. La liberté des journalistes s'est réduite comme peau de chagrin, coincée entre une pensée dominante et moralisatrice, les censures économiques et une certaine complaisance à l'égard du pouvoir politique.


Le parti pris de Virginie Luc pour 'l'art qui dit la vérité' s'explique sans doute par les artistes qu'elle a fréquentés, qu'elle fréquente encore et dont son blogue témoigne intensément. Car l'art peut, tout autant que le journalisme et le blogue, être condescendant et mensonger, cacher ou maquiller la vérité : il faut bien plaire et manger.



En journalisme comme en art et comme en toute chose d'ailleurs, il ne peut y avoir de vérité sans engagement. Un engagement dans l'honneur.



HONNEUR, subst. masc. Principe moral d'action qui porte une personne à avoir une conduite conforme (quant à la probité, à la vertu, au courage) à une norme sociale et qui lui permette de jouir de l'estime d'autrui et de garder le droit à sa dignité morale. (TLFi)



01 février 2005

Trois coups de théâtre

    En marge de La soirée des masques, dimanche soir dernier. Réalité oblige : il y a fort longtemps que je ne suis pas allé au théâtre. Je n'en crois pas moins en sa valeur et en sa portée. Est-ce qu'on y entend encore trois grands coups au lever du rideau? Est-ce qu'il y a encore un rideau?


Premier coup

Le seul et unique rôle de ma carrière d'acteur. Dans une pièce du répertoire classique, en alexandrins, alors que j'étais étudiant : celui d'Oreste dans Andromaque de Jean Racine. Il me reste de ce 'flop' de jeunesse une grande admiration pour celles et ceux qui consacrent leur vie au théâtre.



    HERMIONE.
    
    Je veux savoir, Seigneur, si vous m'aimez.

    ORESTE.
    Si je vous aime? O Dieux! Mes serments, mes parjures,
    Ma fuite, mon retour, mes respects, mes injures,
    Mon désespoir, mes yeux de pleurs toujours noyés,
    Quels témoins croirez-vous, si vous ne les croyez?


Deuxième coup

Au Théâtre Denise-Pelletier, fin des années soixante. En matinée, parmi des groupes d'élèves. Une tragédie grecque dont j'ai oublié le titre. Je me souviens d'un seul personnage : une prêtresse toute drapée de blanc. J'ai eu droit ce jour-là, à une grande leçon comme pédagogue. Malgré que ce soit une tragédie, on entend des rires dans la salle : d'abord quelques-uns, puis d'autres, puis ça n'en finit plus... Les tirades de la prêtresse aux dieux sont vite dominées par les rires de centaines de jeunes, mal préparés à ce genre théâtral... Soudain, la prêtresse se retourne vers nous, s'avance à l'avant-scène et s'écrie en ouvrant les bras : « Ça va faire! » Long silence et stupéfaction générale. Visiblement défaite, la prêtresse drapée de blanc redevient Andrée Lachapelle, qui se met alors à parler aux jeunes -- avec beaucoup d'émotions -- de civisme, de respect, de théâtre et de tragédie grecque. Après l'entracte : une salle attentive comme je n'en ai jamais vue depuis. À la tombée du rideau, des applaudissements chaleureux comme je n'en ai jamais plus depuis entendus au théâtre...



Troisième coup

La phrase de Claude Péloquin gravée sur la grande murale du Grand Théâtre de Québec, oeuvre de Jordi Bonet, qui résume tellement bien le message que nous livre le théâtre depuis des siècles : « Vous êtes pas écoeurés de mourir bande de caves. C'est assez! »



RIDEAU!