La règle première d'un succès médiatique, c'est d'avoir l'air vrai. Parce que le bon public n'aime pas ce qui a est faux. Pour avoir l'air vrai, il faut que tout ait l'air vrai : que les personnages (maquillés) aient l'air vrais, que les décors (en cartons) aient l'air vrais, que le scénario (fictif) ait l'air vrai, que les paroles (apprises par coeur) aient l'air vraies. Le résultat : un bon 'show', c'est-à-dire un spectacle qui a l'air tellement vrai qu'il nous a fait oublier tout ce qui faux même si on sait que c'est faux -- le bon public n'est pas fou, quand même! Bravos! Applaudissements nourris debout dans la salle ou devant l'écran géant des cinémas maison. Cotes d'écoute en hausse. Représentations supplémentaires. Encore! Encore! On aime tellement s'en faire accroire.
Est-ce le politique qui a fait appel aux médias, sont-ce les médias qui se sont emparés du politique ou simple convergence? Je penche pour la deuxième hypothèse : j'ai déjà dit pourquoi dans un message aux chefs de partis. Toujours est-il que nous voilà maintenant en présence d'une campagne électorale où les chefs (vedettes) ont besoin d'un succès médiatique pour être élus démocratiquement : il leur faut donc avoir l'air vrais. Or, pour avoir l'air vrais, il leur faut répéter et faire confiance à l'équipe de réalisation, les vrais artistes vous le diront; sinon ça risque de sonner faux et c'est le désastre assuré. Il leur faut donc être bien dirigés et bien encadrés par la gent communicatrice : il leur faut un bon metteur en scène, un bon scénariste capable d'écrire des dialogues percutants, une équipe de soutien fiable tant sur le plan artistique que sur les plans logistique et technique. Et comme il s'agit d'une tournée (308 spectacles-circonscriptions en un mois, sans compter les rappels en catastrophe), il faut un autobus pour transporter toute cette équipe de 'véri-faiseurs', et un autre autobus pour les 'véri-ficateurs' télé-radio-presse (et un jour, -Internet) chargés de faire connaître tout ce qui sort de vrai à chaque arrêt spectacle. Dans les studios de pré-diffusion et les salles de pré-impression, on spécule (vrai ou faux?), on évalue l'effet surtout si le faux à l'air vrai et on finit par diffuser ou publier les citations et les clips qui auront l'air le plus vrais aux yeux et aux oreilles du monde. Parce que dans les maisons cinémas, le faux ne passera pas : les bons téléspectateurs ne regardent que ce qui a l'air vrai. Observez les extraits montrables montrés : ils sont très courts; il faut croire que les moments de vérité sont rares chez nos politiciens. Et à lire, voir ou entendre les communicateurs médianalystes en vue -- parce qu'ils ont l'air tellement vrais --, ces pauvres chefs qui aspirent à diriger le Canada ont encore beaucoup à faire, eux, pour avoir l'air suffisamment vrais. « D'ailleurs, les sondages le prouvent. »
J'ai encore une semaine pour faire mon choix dans cette campagne, c'est-à-dire distinguer le vrai du faux. Heureusement, je pourrai encore compter sur les médias pour m'éclairer.
Vive la vraie médiacratie!
Aucun commentaire:
Publier un commentaire