16 février 2004

Les limites du genre

Je veux parler de ces documentaires qu'on sort au moment du décès d'un personnage politique qui a marqué notre pays. Une occasion de feuilleter des pages d'histoire et de revoir des images du dernier siècle en refaisant le parcours d'un homme, de son entourage et de son temps à travers les lunettes d'une équipe de production. L'excellent reportage de Zone libre, « Claude Ryan, un homme engagé » présenté hier soir à la télévision publique, est l'un de ceux-là.


Malgré tout, le genre a ses limites. La limite des archives disponibles, la limite du format, la limite du discernement.


La limite des archives est implacable : notre société présentiste a tendance à effacer les traces qui témoignent du passé. Dans ce cas-ci, heureusement, l'équipe de recherchistes semble avoir eu l'embarras du choix : plus de 700 documents d'archives ont été utilisés.


La limite du format est plus discutable : le documentaire doit non seulement informer mais aussi intéresser l'auditoire et les publicitaires, donc plaire à tout prix. Il s'ensuit un scénario, un découpage, des choix d'événements, d'images, d'extraits sonores, et un traitement infographique target-oriented. Dans quelle mesure la fidélité à l'homme et à son temps a-t-elle été sacrifiée dans tout ce processus? Seul Claude Ryan pourrait le dire.


La limite du discernement est insondable : il y a des choses qui ne doivent pas être dites, ni montrées, ni même suggérées. Mais lesquelles et selon quels critères? C'est ici que je suis resté sur ma faim en regardant « Claude Ryan, un homme engagé » : j'aurais aimé mieux comprendre les motivations profondes de cet homme sur les plans politique, social et spirituel. On connaît mieux l'une de ses sources, le cardinal Newman, mais le voile a été à peine levé sur le fond de sa pensée : quelles ont donc été les motivations des fidélités du citoyen Ryan? Ça reste à lire.


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