03 février 2005

La Méduse et Cassandre



(...)


Mme la ministre, au musée du Louvre, il y a une statue de Cassandre. Une statue qui, comme beaucoup de vestiges, nous est arrivée démunie de ses membres et de sa tête. Simplement un torse. Celui de Cassandre. Ce torse, qui n'est rien d'autre qu'un bloc de marbre, semble dire : vous pouvez décapiter toute tentative d'existence de moi, mais il restera, ne serait-ce que dans la tournure de mon thorax, suffisamment de mystère pour que survive l'incompréhensible présage.


Cet incompréhensible présage, il est précisément ce qui forme la mémoire collective. L'histoire se souvient des bourreaux, des juges et parfois des victimes, mais elle n'oublie jamais ceux et celles qui, cherchant à comprendre les trois, ont su n'être aucun d'entre eux. Ceux-là, on peut les appeler les fous, les poètes et les penseurs. Votre absence de dimanche soir nous annonçait votre décision de les abattre. Baissez votre jeu, faites-nous voir votre masque. Il a, peut-être, les traits ahuris de la Méduse.


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