22 janvier 2005

Dieu à la télé

La télé n'est pas faite pour ça mais il arrive qu'elle nous amène à penser. Ainsi, hier, durant mes pauses télé du midi et du soir, ces arrêts qui me donnent l'impression d'être en mouvance avec le monde, la SRC nous a rouvert les yeux sur l'avenir de notre patrimoine religieux, sur la résurgence du fondamentalisme chrétien aux États-Unis et sur la shoah qui hante encore la Pologne. C'aurait pu s'arrêter là; j'aurais pu passer à autre chose, aux nouvelles qui n'arrêtent pas de se renouveler... Mais non : après ces trois heures là, je me suis mis à penser, à faire des liens.



L'église d'à-côté est à vendre. La nôtre s'anime un dimanche sur deux, mais combien de temps encore entendrons-nous sa cloche se répercuter dans le vallon où gîte Saint-Armand... Elle fera dans x temps simplement partie de la banque de données du patrimoine religieux québécois, témoin d'un autre âge, celui que j'ai connu, enfant. Vestiges gênants de la révolution tranquille qui aura tranquillement pas vite tout emporté de ce que nous croyions dur comme fer à l'abri du temps parce que voué à Dieu. Mais Dieu est disparu aussi mystérieusement qu'il est mystère; Dieu n'est plus, plus dans les églises du moins. Il serait maintenant dans les banques où il favoriserait le développement, paraît-il durable cette fois : je ne peux malheureusement pas le confirmer parce qu'à leurs guichets, rien n'y paraît.



La télé a cela de bon qu'elle ne nous laisse pas longtemps nous mordre le frein. En soirée, encore Dieu à l'antenne. Cette fois appelé à la rescousse pour sauver le rêve américain. À deux kilomètres en droite ligne au sud d'ici, de l'autre bord de la frontière bien gardée d'un côté, le Dieu de la Bible que j'ai connu s'est remis à exister. On lui bâtit des temples, on le prie en grosses gangnes et ostensiblement, on l'enseigne dans des universités; certains voudraient même qu'il préside à l'État et prenne en charge -- si ce n'est déjà fait -- la lutte internationale contre le Mal, ce Mal qui aurait anéanti leurs deux tours fétiches un certain onze septembre. À la suite du reportage, on a parlé d'un semblable retour ici, chez nous, du besoin de prier... Mais sans images, entre invités autour d'une table : je ne les ai donc pas cru. À un moment donné, des chiffres sont apparus au bas du petit écran : 85% des Québécois se disent catholiques; 5,6% se disent sans religion... Je ne les ai pas crus non plus.



L'incursion en Pologne que nous a fait faire ensuite Zone libre à l'occasion du soixantième anniversaire de la libération d'Auschwitz m'a plus touché. Ces millions de juifs qu'on a pu exterminer dans des camps dont jamais personne n'a jamais pu décrire l'horreur, au milieu d'une Pologne catholique elle-même persécutée et décimée... Cette shoah qu'on a tout fait pour oublier jusqu'à ces années-ci on ranime le souvenir...



Quel est le lien entre notre patrimoine religieux, la montée du fondamentalisme religieux chrétien au sud et l'anniversaire de la shoah? Dieu. Avec lui, en lui et pour lui, bref grâce à lui, nous pouvons aussi bien justifier notre grandeur d'âme que notre inanité et notre perfidité.



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