04 mars 2004

Viagrrra

La superposition de deux images a abruptement mis fin hier soir à mon Téléjournal et au relicat de crédibilité que je lui accordais encore : l'image plein écran d'un losange bleu marqué « Viagra » immédiatement suivie par celle du présentateur aux cheveux blancs. Comme si Gilles Gougeon émanait de la pilule bleue... C'en était trop! Coupez! On ferme tout!


J'ai  h o r r r e u r  du mot Viagra. C'est un mot teigne qui n'en finit pas de s'inscruster partout sans aucune pudeur et sans aucune retenue. Pas une journée sans qu'il ne s'impose effrontément dans mes courriels ou qu'il ne s'y infiltre hypocritement en prenant toutes sortes de formes orthographiques dégénérées : un macro virus indécrochable, la peste numérique en six lettres!


Et puis... On ne peut plus regarder La soirée du hockey sans voir apparaître à tout moment « Viagra » sur les bandes. On ne peut plus rouler sur une autoroute sans y voir un panneau érigé au « Viagra ». On ne peut plus feuilleter un magazine sans que « Viagra » nous saute au visage au tournant d'une page... C'est une invasion de pilules barbares, c'est du pharmaterrorisme, c'est une arme de destruction massive de la masculinité, c'est une atteinte au pouvoir séculaire de la féminité, c'est une calamité médiatique que rien ni personne ne semble pouvoir ni vouloir juguler.


Mais c'est aussi une tragédie intérieure, un drame personnel appréhendé. Mon seuil de tolérance au mot Viagra arrive à un point critique : plus je vois le mot Viagra, plus je me sens devenir impuissant. Et plus je me sens devenir impuissant, plus je suis tenté de céder à l'euphorie illusoire promise par la biotechnologie aux mâles en mal d'amour.


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